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WEB Nano Saclay

Faits marquants 2018

26 novembre 2018

Les matériaux ferroélectriques qui présentent une polarisation électrique renversable sous l’application d’un champ électrique sont devenus une brique essentielle pour le développement des composants dans des domaines variés allant de l’électronique aux capteurs et transducteurs en passant par la spintronique. Récemment, il a été montré que contrairement aux ferroélectriques actuels qui souffrent des conséquences de la miniaturisation, les matériaux à base de HfO2, déjà utilisés comme oxyde de grille dans les technologies CMOS, deviennent non seulement ferroélectriques mais leur polarisation se renforce d’autant plus que les dimensions se réduisent. Cependant, ces matériaux, bien que prometteurs, présentent un mécanisme de  ferroélectricité qui reste encore à élucider.

En collaboration avec le groupe de B. Noheda (University of Groningen) et de J. Íñiguez (LIST),  nous avons montré que des couches minces d’épaisseurs inférieures à 10nm de Hf0.5Zr0.5O2 épitaxiées sur des substrats (001)- La0.7Sr0.3MnO3/SrTiO3, présentent une très forte polarisation de 34 µC/cm2 qui ne nécessite aucun cycle dit d’éveil, habituellement nécessaire pour développer la polarisation dans ces matériaux. En effet, ces films, qui sont dans un état de contraintes compressives et essentiellement orientés selon la direction [111], ne possèdent pas la symétrie orthorhombique communément reportée dans la littérature mais une symétrie rhombohédrique. La découverte de cette nouvelle phase ferroélectrique stabilisée par le rôle combiné de l’effet de taille et de la contrainte permet d’envisager une approche analogue pour induire une polarisation forte dans des matériaux simples qui jusque-là n’avaient jamais été considérés comme potentiellement ferroélectriques.

Ces travaux, publiés dans Nature Materials, ont été menés dans le cadre du projet phare AXION.

(Gauche) Polarisation (noir) et courant corrigé (bleu) d’une couche de 5 nm de Hf0.5Zr0.5O2 (HZO) en fonction du champ appliqué à 1 kHz. (Milieu) Image de microscopie HAADF-STEM d’une couche de 9 nm observée le long de l’axe de zone [110] montrant un domaine d’orientation [111] de HZO. (Droite) Image de diffraction électronique (SAED) selon l’axe de zone [111] de la couche 9 nm-HZO montrant un jeu de deux ensembles de 6 tâches de diffraction (cercles jaunes et bleus) qui sont toutes de type {220} attestant de la symétrie rhombohédrique.

 

Référence: A rhombohedral ferroelectric phase in epitaxially strained Hf0.5Zr0.5O2 thin films
Y. Wei, P. Nukala, M. Salverda, S. Matzen, H. J. Zhao, J. Momand, A. S. Everhardt, G. Agnus, G. R. Blake, P. Lecoeur, B. J. Kooi, J. Íñiguez, B. Dkhil and B. Noheda

Nature Materials (2018).

Contacts NanoSaclay: Sylvia Matzen, C2N et Brahim Dkhil, CentraleSupélec

Collaborations:

•    Zernike Institute for Advanced Materials, University of Groningen, Pays-Bas
•    Materials Research and Technology Department, Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST), Luxembourg.

 

27 juillet 2018

Actuellement, les mémoires non volatiles résistives (ReRAM) sont des mémoires émergentes qui apparaissent comme très prometteuses, à la fois pour le stockage d'informations à haute densité et le calcul bio-inspiré. Pour pouvoir progresser et obtenir un contrôle plus précis des caractéristiques de la transition  résistive (vitesse, nombre maximum de cycles de modifications, etc…), une meilleure compréhension des mécanismes de transition sous-jacents est nécessaire.

Les résultats obtenus permettent de déterminer les éléments importants impliqués dans le mécanisme de transition résistive de matériaux à base d’oxydes de cobalt-lithium (LixCoO2). En particulier, les images obtenues par la technique de Spectrométrie de Masse d'Ions Secondaires (SIMS en 3D) montrent que le mécanisme de transition fait intervenir la migration d’ions lithium du film de LixCoO2 vers l’une des électrodes (en silicium dopé). Ce phénomène entraîne simultanément une diminution de la stœchiométrie (x) de LixCoO2 qui subit une transition semiconducteur-métal vers un état environ 1000 fois plus conducteur.
D’autre part, les résultats expérimentaux montrent une influence considérable de la diminution des dimensions des dispositifs sur leurs propriétés de commutation, notamment le temps de transition. La simulation numérique proposée permet d’obtenir un bon accord qualitatif avec ces observations.

Ces travaux ont été menés dans le cadre du projet phare AXION

Référence  : Direct Evidence of Lithium Ion Migration in Resistive Switching of Lithium Cobalt Oxide Nanobatteries
V. S. Nguyen, V. H. Mai, P. Auban-Senzier, C. Pasquier, K. Wang, M. J. Rozenberg, N. Brun, K. March, F. Jomard, J. Giapintzakis, C. N. Mihailescu, E. Kyriakides, P. Nukala, T. Maroutian, G. Agnus, P. Lecoeur, S. Matzen, P. Aubert, S. Franger, R. Salot, P.-A. Albouy, D. Alamarguy, B. Dkhil, P. Chrétien, and O. Schneegans

Small 2018, 1801038

Contact NanoSaclay: Olivier Schneegans, PHEMADIC, GeePs, CentraleSupélec

Collaborations:

07 mai 2018

Lorsqu’on les refroidit, les pérovskites de nickel tel que NdNiO3 présentent une transition de phase d’un état métallique vers un état isolant. Bien que le mécanisme précis de cette transition ne soit pas parfaitement compris, cette transition métal-isolant est attractive pour la réalisation de dispositifs comme des commutateurs ou des synapses électroniques.

Dans un article récemment publié dans la revue Nano Letters, une équipe associant notamment l’Unité Mixte de Physique CNRS/Thales et le Laboratoire de Physique des Solides d’Orsay a pu étudier la transition métal-isolant d’une couche mince de NdNiO3 à l’échelle nanométrique. Grâce à l’utilisation d’un microscope à force atomique muni d’une nano-pointe conductrice, les chercheurs ont réalisé des cartographies de la résistance locale. Ils ont ainsi montré que lors de la transition, des zones conductrices coexistent avec des régions isolantes, correspondant à un phénomène de séparation de phase électronique. Ces résultats suggèrent que la transition se produit dans un régime de percolation en deux dimensions, et ouvrent la voie vers l’exploitation de la séparation de phase dans des nanodispositifs électroniques.

Ces travaux ont été réalisés dans le cadre du Flagship AXION, et ont également bénéficié d'un soutien financier du projet ERC CoG « MINT » (#615759)

Référence : Direct Mapping of Phase Separation across the Metal−Insulator Transition of NdNiO3

D. Preziosi, L. Lopez-Mir, X. Li, T. Cornelissen, J. H. Lee, F. Trier, K. Bouzehouane,  S. Valencia, A. Gloter, A. Barthélémy, and M. Bibes
Nano Letters 2018, 18 (4), pp 2226–2232

Contact NanoSaclay: Manuel Bibes, Unité Mixte de Physique CNRS/Thales

Collaborations:
•    ICMAB-CSIC Campus de la UAB, Barcelone, Espagne
•    Laboratoire de Physique des Solides, Université Paris Sud, Orsay
•    Helmholtz-Zentrum Berlin für Materialien und Energie, Berlin, Allemagne

 

07 mai 2018

Les transducteurs piézoélectriques convertissent l'énergie électrique en énergie mécanique (et vice-versa). Ils sont largement utilisés dans des domaines très variés allant du médical (imagerie échographique) à l’industrie automobile (déclencheur airbag) en passant par la robotique, les systèmes de guidage ou encore les télécommunications. L’essentiel de ces applications utilisent des matériaux polycristallins dont la déformation induite sous champ électrique n’excède pas aujourd’hui 0.7 % posant ainsi des limites d’efficacité et de résolution dans les dispositifs actuels.

En collaboration avec l’IIS de Bangalore en Inde, des chercheurs de CentraleSupélec ont obtenu une déformation induite sous champ électrique jusqu’à 1.3 %, c’est-à-dire quasiment près de deux fois la valeur record jusque-là observée, en concevant dans cette intention, un matériau piézoélectrique à base du ferroélectrique BiFeO3-PbTiO3-LaFeO3. Ce choix permet une auto-nanostructuration où domaines ferroélectriques nanométriques, coexistence de phases de basse symétrie et à forte déformation spontanée, et forte sensibilité à répondre à une sollicitation électrique en sont les ingrédients. Cette stratégie de nanostructuration permet d’envisager de meilleurs dispositifs transducteurs piézoélectriques ainsi que de nouveaux matériaux piézoélectriques dont la déformation pourrait valoir plusieurs % !

Ces travaux ont été menés dans le cadre du Flagship AXION.

Référence : Electrostrain in excess of 1% in polycrystalline piezoelectrics

B. Narayan, J. S. Malhotra, R. Pandey, K. Yaddanapudi, P. Nukala, B. Dkhil, A. Senyshyn and R. Ranjan
Nature Materials 17, pp 427–431 (2018)

Contact NanoSaclay: Brahim Dkhil, SPMS, CentraleSupélec

Collaborations:
•    Department of Materials Engineering, Indian Institute of Science, Bengalore, Inde
•    Source expérimentale de neutrons Heinz Maier-Leibnitz (FRM II), Université Technique de Munich, Allemagne.

04 mai 2018

En couplant deux nanolasers, des physiciens du C2N en collaboration avec l’Université des îles Baléares avec ont pu générer un système hors-équilibre émettant des bouffées de photons fortement corrélés, dits « super-thermiques ». Cette approche ne se limite pas à l’émission Laser mais peut être étendue à d’autres systèmes nanométriques.

Du fait de leur faible taille, les nanolasers possèdent des propriétés remarquables, notamment une faible consommation et une faible dimension. Ils font l’objet de nombreuses études visant des applications diverses, des télécommunications à l’information quantique. En les couplant d’une manière compacte, il est possible de réaliser une ingénierie de la statistique des photons émis, produisant notamment des fortes corrélations, ce qui constitue un atout pour des applications telles que la conversion non-linéaire d’énergie, l’imagerie « fantôme » qui se développe en astrophysique ou encore l’information quantique. Lorsque le couplage entre les nanolasers est faible, on peut distinguer l’émission de chacun d’eux. En revanche, si le couplage est fort, les photons se distribuent entre deux modes, hybrides, peu sensibles aux perturbations. C’est l’échange d’énergie entre ces modes qui est étudié ici lorsque le système est excité par des impulsions lasers plus courtes que les temps caractéristiques électroniques mis en jeu. Cette excitation place le système hors équilibre. L’un de ces modes se comporte alors comme un laser et est soumis à des faibles fluctuations, tandis que l’autre passe sur un régime d’émission spontanée très particulier. Il émet des bouffées de photons avec une statistique dite « super-thermique » : les photons ne sont pas émis un par un ou en continu, mais par bouffées où les photons sont concentrés dans des temps courts. Cette démonstration a été rendue possible par la mise en place d’un dispositif original permettant la mesure de la statistique complète des photons émis, malgré les temps très brefs mis en jeu, pour lesquels il n’existe pas de détecteurs suffisamment rapides. Les chercheurs visent désormais à obtenir ce même type de mesure avec très peu de photons, en régime quantique.

Cette technologie ne nécessite pas d’ingénierie particulière des émetteurs ni une interaction entre modes, contrairement aux résultats connus à ce jour. De ce fait, l’approche peut être transposée à bien d’autres systèmes. Les chercheurs ont ainsi démontré que la statistique « super-thermique » par mise hors équilibre d’un système, est générique. C’est le cas par exemple d’expériences sur le mouvement brownien appliqué au pollen en suspension. Dans cette analogie, les grains de pollen et leur énergie potentielle sont assimilables aux photons. Le système est mis hors équilibre grâce à une brutale chute de la température. Nous observons alors que le mouvement des grains suit également une statistique « super-thermique ». L’étude des systèmes nanométriques et à faible nombre de photons horséquilibre, encore balbutiante, s’avère donc particulièrement prometteuse.

Ces résultats s'inscrivent dans le cadre du projet ICQOQS financé par le LabEx NanoSaclay.
 

Référence : Far-from-Equilibrium Route to Superthermal Light in Bimodal Nanolasers

M. Marconi, J. Javaloyes, P. Hamel, F. Raineri, A. Levenson, and A.M. Yacomotti
Physical Review X 8, 011013 (2018)

Contact NanoSaclay: Alejandro M. Yacomotti, C2N

Collaboration: Département de Physique, Université des îles Baléares

 

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